Portik par Veolia RVD : l’IA at edge pour optimiser le tri des déchets
IoT, edge computing et machine learning : afin d’améliorer la performance des centres de tri sélectif des déchets, Veolia a développé le projet Portik. Cette solution basée sur les technologies Cloud les plus récentes, et notamment AWS Greengrass, permet d’évaluer la qualité et la pureté du flux de déchets triés en sortie du processus de tri industriel.
Les équipes Devoteam Revolve ont eu la chance d’accompagner Veolia dans ce projet, et ont participé à l’industrialisation du prototype, au développement des modèles de reconnaissance d’objets, et à la mise en place de la plateforme Cloud et edge computing assurant la collecte, le traitement et la visualisation des données.
Séverin Chazalmartin, IT domain manager Veolia, répond à nos questions sur ce projet et sur la collaboration avec les équipes de Devoteam Revolve.
Dans quel contexte avez-vous développé l’innovation Portik ?
A l’origine de ce projet, il y a une vision innovante et une stratégie de Recherche et Développement long-terme portée par les équipes du Département des Expertises Scientifiques et Technologiques (DEST). Ces travaux de recherche visaient à proposer un système d’évaluation automatisée et continue de la qualité et de la pureté d’un flux de déchets triés en sortie d’un processus de tri industriel. Les travaux de R&D de l’équipe DEST ont notamment permis de mettre au point le premier prototype PortiK, en 2018.
La mise en œuvre de PortiK au sein de notre entité Veolia Recyclage et Valorisation des Déchets (RVD) fait suite au gain, en 2019, d’un appel d’offre pour la construction d’un nouveau centre de tri destiné au recyclage du tri sélectif des déchets. Dans sa réponse, Veolia RVD a apporté un certain nombre d’innovations pour améliorer la performance du centre, et parmi celles-ci, Portik.
Dès lors, il s’agissait de passer du prototype R&D à une version industrielle, normée, cyber-sécurisée, à livrer en six exemplaires sur un nouveau Centre de Tri.
Quels sont les enjeux de qualité en sortie du processus de tri ?
Sur un centre de tri de collecte sélective, les déchets issus des bacs de tri sélectif de plusieurs communes sont regroupés. Les déchets reçus représentent un mélange de plusieurs types de matières. Le centre met en œuvre des étapes de séparation mécanique, électromagnétique ou optique, utilisant les propriétés géométriques, mécaniques ou chimiques des objets triés afin de séparer les métaux, les plastiques et les papiers.
L’enjeu implique l’intégralité de la filière de recyclage : depuis la collectivité (producteur du déchet) jusqu’au repreneur de la matière triée (aussi appelée « Matière première secondaire »), en passant bien entendu par le Centre de Tri. Il est régi par la notion de Prescriptions Techniques Minimales (PTM) qui définissent précisément le niveau de pureté à atteindre en sortie, en fonction de l’entrant.
Un flux de plastiques qui contient des cartons dégrade la qualité de la filière de recyclage, et tout le monde en pâtit. Une meilleure pureté en sortie, c’est la garantie d’un recyclage plus vertueux pour l’environnement, on évite ainsi les refus de recyclage. C’est aussi pour l’exploitant une meilleure valorisation du tonnage.
Quelle est l’innovation apportée par Portik ?
Il s’agit de la mise en place d’un contrôle par caméra et par IA de la qualité des déchets qui circulent en fin de processus. Veolia a développé cette innovation dans le cadre d’un projet R&D porté par son centre de recherche, et a testé avec succès un premier prototype que nous avons ensuite cherché à industrialiser.
Nous avons notamment fait évoluer le matériel pour quelque chose de plus robuste, plus adapté au milieu industriel. Nous avons également repris le code de développement pour l’adapter à nos standards Cloud, à nos exigences de sécurité, et aux procédures d’interface avec le milieu industriel, et nous disposons aujourd’hui d’une version disponible sur étagère.
Portik est en service depuis septembre 2023 sur le nouveau centre de tri, et nous continuons à travailler à son amélioration, toujours avec l’aide de l’équipe Devoteam Revolve.
Comment Devoteam Revolve vous a accompagnés sur ce projet ?
Nous avions besoin de compétences pointues sur des domaines que nous n’avions pas en interne chez RVD, dans le cadre du projet d’industrialisation du prototype R&D, comme la Data Science/IA et le lien avec les automatismes et les protocoles industriels.
En faisant appel à Devoteam Revolve, nous avons pu acquérir ces compétences et monter en puissance sur le sujet. Jusqu’alors, la DSI se limitait au domaine purement IT, et tout ce qui était du domaine industriel était délégué à l’exploitant. Avec la montée en puissance des enjeux de cybersécurité, la DSI nationale est maintenant missionnée pour accompagner la sécurisation des processus industriels, en commençant par les points d’interface avec l’IT.
Portik est typiquement un point d’interface entre IT et OT (operation technology) : on vient capter un flux d’images sur un processus industriel, en passant par le réseau local. Nous avons donc dû construire une solution cyber-sécurisée by design, qui puisse gérer l’interface entre le Cloud et les contraintes d’un outil industriel. C’était un gros challenge, car la sécurité représente maintenant presque la moitié d’un projet, cela imprègne vraiment toutes nos réflexions. Pour résumer, l’équipe Devoteam Revolve, et notamment Walid Abdaoui, Julien Cachou, Arthur Saint-Denis et Victor Chevillotte nous ont aidé à relever les principaux défis de ce projet autour de l’IA, des automatismes et de la sécurité associée.
Quel était le périmètre confié aux équipes Devoteam Revolve ?
Devoteam Revolve est intervenu sur l’ensemble des fonctionnalités et des briques techniques de Portik. J’ai apprécié que l’équipe se démarque sur des domaines d’expertise complémentaires et très cohérents : Cloud, edge computing, IA, automatismes… ce sont des sujets dans l’air du temps, et leur expertise leur a permis de répondre parfaitement aux besoins du projet.
Que retenez-vous de cette collaboration ?
Avant tout, c’est une aventure humaine et de belles rencontres. Nous avons pu travailler avec des personnes qui ont un parcours très intéressant, et qui sont des “makers”. Ils aiment faire, tester, itérer, et j’ai beaucoup apprécié leur pragmatisme et leur curiosité, leur capacité à tester rapidement des solutions, quitte à “fail fast”.
Leurs compétences dépassent le cadre du développement, ce sont des personnes proactives qui ont même cherché d’autres cas d’usage pour améliorer la solution, ou qui ont demandé à participer à des réponses à appel d’offres pour challenger d’autres fournisseurs sur ce type de service. J’ai vraiment apprécié cette curiosité et cette proactivité.
Evidemment, nous avons aussi bénéficié de leurs excellentes qualités techniques, que ce soit sur les sujets d’IA ou Python.
Pourquoi et comment avez-vous choisi AWS Greengrass comme moteur de la solution ?
Notre cahier des charges était de pouvoir faire le calcul au plus proche de l’exploitation. Parmi les solutions de Edge computing, nous avons regardé ce que proposaient les grands acteurs du marché. AWS Greengrass (service IoT Core) était à ce moment la solution la plus performante et la plus intéressante en termes de coûts, de souplesse et de rapidité d’évolution côté AWS.
Par ailleurs, AWS Greengrass avait déjà été mis en œuvre sur des projets similaires chez Veolia, cela nous a donc permis de bénéficier d’un retour d’expérience en interne. Les équipes Devoteam Revolve ayant également l’expérience sur Greengrass, nous avons pu organiser un échange avec nos équipes et ainsi finaliser notre choix. Au fur et à mesure de l’avancée du projet, nos équipes ont pu monter en compétences sur AWS Greengrass, et aujourd’hui nous menons nos propres expériences sur l’outil.
Nous avons également rencontré les équipes AWS, et c’est ainsi que nous avons commencé l’industrialisation du projet. En effet, le prototype n’implémentait pas de logique “edge to cloud” computing, tout était en local, et notre objectif était vraiment de permettre un passage à l’échelle adossé à une infrastructure et des services Cloud adaptés en matière de performance et de sécurité.
Nous avons fait un sprint de 5 semaines avec l’équipe prototyping AWS, ce qui nous a permis de démontrer que la solution répondait au besoin. A partir de là, nous avons continué avec des ressources en interne, et nous avons sollicité l’accompagnement de Devoteam Revolve.
Le mot de la fin ?
C‘est une belle aventure technique et humaine, dans laquelle nous mettons en œuvre des technologies de pointe et les innovations les plus récentes. Le projet est très motivant pour nos équipes, c’est valorisant de se démener pour amener la meilleure innovation possible au métier.
Nous sommes maintenant dans une phase d’amélioration continue, nous préparons une V2 qui sera plus légère au niveau hardware, afin de pouvoir déployer plus facilement la solution, toujours en collaboration avec les équipes R&D de Veolia. Nous avons maintenant du recul sur les performances de l’application at edge, donc nous savons ce qui pourrait être allégé (caméra, éclairages, matériel local…), et pour la partie data science, nous allons également élargir la détection d’objets à d’autres cas d’usage que le tri.
L’aventure PortiK se poursuit et portera sur l’amélioration continue de la solution sur différents axes : efficacité des IAs, expérience utilisateurs (exploitant, experts métier), fiabilité et adaptabilité de la solution sur d’autres cas de détection et de classification de déchets.