L’art en entreprise, source d’apprentissage et d’inspiration
Cela fait déjà plusieurs années que nous essayons d’ouvrir nos horizons au delà de la technologie. En 2016 déjà, lors du TIAD, nous avions utilisé le Yoga comme un axe de désautomatisation, et nous avions convié Ivan Sigg à apporter son regard d’artiste sur l’événement. Depuis, Ivan nous accompagne régulièrement, comme lors de cet atelier mélangeant intelligence collective et art en entreprise. L’art s’est invité dans notre quotidien, il est une source d’apprentissage et d’inspiration !
HEAT (Humanity, Engineering, Art & Technology) est le nouveau cadre de nos apprentissages : c’est une proposition alternative par rapport au cadre d’apprentissage SMET (Sciences Mathematics Engineering Technology). Ce cadre nous permet d’entretenir notre ouverture d’esprit, et aussi de trouver une forme de sagesse ! Au quotidien, cela se traduit par des initiatives visant à développer les soft-skills, par l’ouverture de notre écosystème à des intervenants extérieurs comme des artistes ou des chercheurs, et par une place accrue pour l’art dans notre quotidien. En novembre dernier, cette volonté s’est concrétisée par l’organisation d’une semaine artistique, avec une visite au Palais de Tokyo, et l’installation d’Ivan Sigg et de son atelier dans nos locaux.
La place de l’art en entreprise
De l’art en entreprise, pour quoi faire ? Placer un artiste et son atelier au coeur de l’entreprise, c’est une expérience sociale « risquée ». On ne sait pas ce qui va se passer, comment deux éléments a priori si éloignés vont réagir au contact l’un de l’autre. D’un côté l’entreprise, avec son cadre normé et son objectif de productivité. De l’autre, l’artiste, venu également pour produire, sans objectifs, mais avec des outils et des méthodologies en apparence très différentes.
L’art questionne nos pratiques professionnelles
Les premiers visiteurs sont timides. Ils viennent le plus souvent à deux, comme pour se mettre en confiance, ne pas se trouver seul face à l’inconnu. Est-ce un atelier artistique ? Est-ce qu’on va m’obliger à dessiner ? Ce n’est pas vraiment l’objectif, comme nous l’explique Ivan :
“Ce n’est pas un atelier d’art plastique, mais l’opportunité de découvrir un atelier d’artiste, de voir comment l’artiste travaille et quels sont ses outils. C’est un échange, je les interroge sur leur pratique professionnelle, leur poste de travail (un autre terme pour “atelier”), ou leurs outils. A priori, il n’y a pas d’écho entre leur activité et la mienne. Et pourtant on trouve des liens : une oeuvre est un système, une architecture, un projet. Mais ce qui m’intéresse, ce n’est pas le projet ou la toile, c’est tout le processus. Durant mes échanges avec les consultantes et les consultants, nous sommes venus à parler de créativité. Certains ont carte blanche dans leurs projets, ils expérimentent de nouvelles solutions, et testent de nouvelles idées dans un “bac à sable”.
D’un projet à l’autre, les consultants utilisent des outils, parfois les mêmes, mais chaque contexte est différent. Il y a un parallèle avec l’activité artistique, par exemple durant ces trois journées j’ai souhaité refaire certaines cartes du Transformation Day d’après photo. Mais simplement reproduire ne permet pas de faire surgir quelque chose, et le contexte est différent. Je ne suis plus dans les locaux de station F pour un événement, mais chez D2SI pour échanger avec les personnes sur place. J’ai donc travaillé différemment, en utilisant le même outil, un tampon. Comme dans d’autres métiers, je détourne l’outil de son usage premier, pour arriver à un résultat différent. Ceci pour dire que le problème ce n’est jamais l’outil, ni les matériaux. Comme le disait Picasso : “S’il n’y a pas de rouge, je prends du bleu”. De la même façon, dans le cadre d’un projet client, on prend ce qui est donné, outils compris, et il faut composer avec.”
Quel espace pour la créativité en entreprise ?
Au fur et à mesure des rencontres, le thème de la créativité revient régulièrement. Comment développer sa créativité, ou l’encourager ?
C’est le point de départ d’un échange entre Ivan et une consultante, qui suggère qu’il faut “penser hors du chemin” pour être créatif. Pour Ivan, “il faut effectivement sortir du cadre, sortir de l’habitude. Mais il faut s’affranchir de la pensée, car la créativité c’est se mettre en mouvement sans but, c’est lâcher prise avec tous ses sens en éveil. On rencontrera une/notre histoire en chemin, car le chemin est toujours neuf si on est attentif.
Pour stimuler la créativité de l’écriture, je pense que l’observation du réel est un bon point de départ. On observe et on note ce qui se passe, même si cela ne paraît pas intéressant. Quelque chose va surgir, mais il faut lui en laisser l’occasion. Etre créatif demande aussi de savoir prendre des risques, comme de placer son atelier sur un voilier ou dans une entreprise de services informatiques. Et si j’écrivais à une table de café, dans le train, dans le noir ? Il faut essayer, tenter des choses, le risque n’est que psychologique. Si on n’ose pas, il n’y a rien qui vient, mais nos cerveaux reptilien et limbique qui fabriquent de la continuité, des automatismes et les rails de l’habitude nous empêchent de nous laisser aller au “Et si ?”, qui est vecteur de créativité.
C’est aussi une approche qui peut se révéler pertinente dans les métiers de l’IT : et si on limitait le volume de données générées ? Et si on ne développait pas un logiciel supplémentaire ? Poser des questions avec des angles multiples permet d’approcher un problème avec créativité et d’envisager de nouvelles formes de résolution. Je pense qu’en entreprise nous avons besoin d’espaces qui favorisent la créativité. Il peut s’agir d’un endroit, d’un moment, de façons de faire à plusieurs grâce à l’intelligence collective… La créativité est un mouvement, et si on ne l’entretient pas, si on ne s’autorise pas à la laisser surgir, les choses se figent. »