5 conseils pour réussir votre entretien de recrutement
L’entretien de recrutement est-il une science exacte ? Dans quelle mesure peut-on faire confiance à son intuition ? L’objectif de cet article est de partager ma vision sur la manière d’adresser l’exercice de recrutement et d’exposer la méthode que j’ai pu construire au fil des entretiens menés.
1/ Quelles questions se poser avant un entretien de recrutement ?
Première étape avant d’aborder l’entretien, il est est essentiel de définir clairement les objectifs en se posant les questions suivantes : Quel est mon rôle dans le processus de recrutement ? A mon niveau, que dois-je valider ? Pour quel poste ? Quels sont les enjeux ? Les réponses à ces questions vont permettre d’identifier les critères que l’on cherche à valider durant l’entretien.
2/ Préparer l’entretien de recrutement : quels critères ?
Lorsque vous faites vos courses, les faites-vous avec liste ou sans liste ? La comparaison peut paraître osée, mais elle s’applique parfaitement aux règles de l’entretien de recrutement. Si vous faites vos courses sans liste, vous risquez d’oublier quelque chose, voire de passer à côté de votre besoin principal. Ou encore de perdre du temps dans les nombreux rayons du magasin. Avec une liste, vous évitez tous ces pièges… mais vous pouvez passer à côté de certaines choses. Comme de découvrir un produit qui n’était pas sur votre liste, mais qui répond réellement à votre besoin du moment (préparer un repas original, par exemple).
Le mieux est encore de faire ses courses avec une liste mais de ne pas se priver des autres achats utiles possibles en chemin.
C’est la méthode que je préconise en recrutement : venir préparé, avec la liste des points que l’on souhaite valider, sans pour autant ignorer son intuition pendant l’entretien. Cette approche allie objectivité et intuition.
Celui qui recrute au feeling est celui qui vient sans liste. Il va là où la discussion l’amène, glane des infos sur le chemin, va spontanément chercher certaines infos selon son ressenti ou ses envies. Le risque est de se laisser influencer par les émotions, par les biais cognitifs, de ne pas sortir de son cadre de valeur, ou encore de passer complètement à côté de l’objet de l’entretien. Combien de personnes m’ont dit : “J’ai passé un bon moment, on a parlé de pleins de choses… par contre je suis incapable de te dire s’il faut le recruter ou pas !”
Celui qui vient préparé et suit un process établi en se limitant aux faits, court le risque de passer à côté d’informations précieuses. Celles-ci peuvent se révéler quand, au contraire, on laisse parler son intuition. Typiquement, si on s’en tient à la liste, on passe à côté de tout le non-verbal, alors que cela représente 90% de la communication.
L’étape suivante est donc de dresser une liste de critères.
A quoi se réfère-t-on pour dresser une liste ? On doit avant tout chercher à vérifier l’adéquation avec la culture d’entreprise, et pas seulement un ensemble de compétences. C’est assez simple, il suffit de laisser parler sa tête et son cœur, et d’aller à l’essentiel : Qu’est-ce qui semble fondamental pour occuper le poste ? Pour intégrer cette équipe ? Pour rejoindre cette entreprise ?
Durant cette phase, il ne faut pas hésiter à aller chercher de l’information auprès de personnes occupant le même poste, auprès de membres de l’équipe… Qu’est-ce qui leur semble clé? Quelles sont les hard skills et les soft skills nécessaires?
Évitez de tomber dans le piège qui consiste à recruter “quelqu’un comme moi” ou “comme X qui est parfait dans le rôle”. Chaque personne a des atouts et des axes d’amélioration. Rester bloqué sur une personnalité type vous empêchera de vous ouvrir à des personnalités différentes mais tout aussi capables d’endosser le rôle.
Il faut différencier ce que la personne doit avoir (compétences, expérience, comportement professionnel : fiabilité, sens de la confidentialité…) de ce que la personne peut apprendre une fois dans la société. Rappelez-vous certains de vos collègues à leur arrivée, ou même vous, vous étiez loin d’avoir cette connaissance en particulier ou cette soft skill !
Il peut être pertinent de pondérer vos critères : distinguer ceux qui sont indispensables de ceux qui sont de l’ordre de l’idéal ou du préférable. Cela vous évitera de recruter un développeur java qui dispose de tous les critères “nice to have” mais qui ne sait pas coder !
On m’a déjà demandé quelle question piège un recruteur peut poser… Est-ce vraiment nécessaire ? Sincèrement je ne pense pas. L’entretien de recrutement ne doit pas être un combat d’arène. Ce n’est pas parce que vous avez été bizuté lors du votre que vous devez reproduire ce schéma. Souvent les gens le font par manque d’expérience sur ce qu’est un entretien de recrutement, par manque de repères sur l’objectif de l’entretien. Posez-vous simplement la question : à quoi ça sert ? Est-ce qu’une question piège me permettra de valider si la personne a sa place dans l’entreprise ?
3/ Pendant l’entretien : valider les critères établis…mais pas seulement !
Gardez bien en tête de ne pas vous en tenir qu’à votre liste de course ! L’enjeu de l’entretien de recrutement est double : il vous faut non seulement en retirer des faits, c’est à dire valider vos critères de manière objective, mais également observer, ressentir… bref être à l’écoute de votre intuition.
Comment valider des faits de façon objective ? En pratiquant l’art du questionnement, en recourant à la technique de l’entonnoir. Par exemple, je peux dire que cette personne ne va pas spontanément demander de l’aide car à trois reprises elle a témoigné de projets où elle n’a pas procédé ainsi. Je l’ai également amenée à réfléchir à ce point et, d’elle-même, elle admet ne pas spontanément solliciter des conseils auprès des autres.
Concernant votre niveau d’exigence, il peut être intéressant de vous remettre dans la peau du jeune débutant que vous étiez lors de votre entretien d’embauche… Auriez-vous su répondre à cette question ? Est-ce rédhibitoire ?
Pour terminer, quelques conseils. On a trop souvent tendance à “lâcher le morceau”. N’abandonnez pas un sujet tant que vous n’avez pas pu déduire votre point de façon certaine. Mais allez-y finement, rien ne sert de s’acharner, vous n’en tirerez rien de bon. Si à terme vous arrivez à mener l’entretien de recrutement sous forme de discussion de telle sorte que la personne soit elle-même, cela vous apportera encore plus d’information sur ce qu’elle sera demain en entreprise.
4/ Après l’entretien : l’analyse
Je préconise une première analyse rapide, à chaud, juste après l’entretien : ai-je bien validé les critères ? Quel est mon ressenti : Ai-je envie de travailler avec cette personne ? Est-ce qu’elle m’inspire confiance ?
Ensuite, une analyse à froid permet de rassembler ses idées, de faire le point sur les critères évalués. Certains critères sont essentiels, d’autres moins. C’est le bilan de ces critères, pondérés, qui va faire que globalement j’émets un avis positif ou négatif.
Il faut également challenger son ressenti : qu’est-ce qui m’amène à penser ça? Qu’est-ce que cela m’indique ? Il faut arriver à relier ses intuitions à des faits. Attention également à ne pas tomber dans le piège des biais cognitifs.
Si le doute subsiste encore, il est toujours possible de compléter par une prise de référence pour confirmer ou infirmer une impression, ou de prévoir un deuxième entretien avec un autre regard, un test de personnalité… pour autant, aucune méthode n’est infaillible. Je recommande aussi de faire un debrief avec le candidat, cela permet de continuer à apprendre des choses et de confirmer certaines intuitions.
5/ Émettre un avis constructif (et argumenté)
Une règle d’or : Quand on ne sait pas, mieux vaut ne rien dire ! Il est préférable d’être honnête envers soi-même et admettre qu’un point n’a pas été validé.
Si vous avez recueilli rigoureusement des faits qui valident les critères essentiels pour occuper le poste et que vous avez challengé les signaux envoyés par votre intuition… alors votre avis est le bon, faites-vous confiance !
Durant le debrief, on peut s’appuyer sur ses intuitions. Dans ce cas je recommande de préciser “ j’en déduis que….”, “ cela m’amène à penser que…” puis de demander confirmation auprès de la personne : “est-ce que je me trompe ?” ou “qu’en pensez-vous ?” Cet exercice a l’avantage de confirmer ses inférences et de surcroît de faire réfléchir le candidat.
Comment juger de l’équilibre entre hard et soft-skills ? Vous prendrez rapidement conscience que bien souvent la personnalité (soft-skills) prime sur les compétences (hard-skills), même dans des métiers très techniques. En effet les relations humaines sont prépondérantes dans le quotidien des entreprises. A votre avis, mieux vaut-il recruter un candidat au CV parfait, mais dont la personnalité s’accorde mal avec la culture d’entreprise, l’équipe ou encore vos attentes ? Ou est-il préférable de miser sur le candidat qui ne dispose pas encore de l’ensemble des connaissances sur le métier, mais avec les qualités requises pour apprendre, et qui semble le plus apte à s’intégrer dans l’équipe.
Quel timing pour le debrief de l’entretien ? S’il est possible de le faire dans la foulée de l’entretien, à la fin de l’échange, il est préférable de faire un retour à froid. Cela permet de prendre du recul, et de mettre en perspective avec les autres candidats rencontrés. Par ailleurs, délivrer un retour quand il est négatif n’est pas toujours évident. L’intérêt d’un debrief à froid est qu’il permet aussi de réfléchir à la manière d’amener les choses. J’ai la conviction qu’il est vraiment dans l’intérêt du candidat que le recruteur soit le plus sincère possible. Recevoir un retour non argumenté ou une fausse excuse est non seulement frustrant, mais en plus cela n’apprend rien au candidat, il ne peut pas comprendre pourquoi il ne correspondait pas au poste.
Si vous délivrez votre avis directement à l’issue de l’entretien, il faut que vous ayez réussi à mettre au clair vos idées pendant l’échange, ce qui n’est pas facile. Parfois cependant les choses sont limpides ou encore vous avez suffisamment d’éléments et êtes confiant en votre jugement pour vous prononcer séance tenante. Soyez dans ce cas vigilant à ce que le feeling (ressenti, émotion) ne vous influencent pas dans votre retour.
En me basant sur mon expérience (de recruteuse), je vous ai livré ce qui me semblait utile d’avoir en tête lorsqu’on endosse la casquette de recruteur. Bien sûr, ces conseils ne sont pas exhaustifs. Vous pouvez les adapter à votre contexte et les affiner au fur et à mesure de vos entretiens. Je vous souhaite de prendre du plaisir dans cet exercice fascinant !