Avez-vous la culture DevOps ?
Si le DevOps est parfois une question d’outils, il s’agit avant tout d’une culture. Mener une transformation DevOps réussie suppose de comprendre et d’intégrer cette culture, basée sur des piliers comme la coopération, la transparence… et l’automatisation. A l’occasion du TIAD, nous avons eu l’opportunité d’évoquer ces sujets avec Jessica DeVita et George Miranda, tous deux évangélistes techniques pour le compte de Chef, outil d’automatisation d’infrastructure.
Sommes-nous passés de la culture de la compétition à celle de la coopération ?
Jessica : L’IT a longtemps souffert d’une culture de rétention de l’information. Le savoir détenu par certaines personnes, leur connaissance de certains process étaient devenus leur seule valeur ajoutée. Puis les entreprises et les départements IT ont dû se transformer pour répondre à l’accroissement de la demande et passer à l’échelle. Nous sommes entrés dans l’ère de l’automatisation et du DevOps, et ne pas partager l’information va à l’encontre de cette nouvelle culture DevOps, axée sur le partage. C’est un changement culturel, mais qui doit être soutenu par les outils.
George : En effet cette transformation s’appuie sur les outils. Par exemple, on me demande souvent si Chef nécessite d’utiliser GitHub. Or, la question n’est pas tant de savoir si on utilise GitHub ou un autre gestionnaire de source, mais de savoir si par défaut on autorise le fork de code, la soumission de changements… bref de savoir si on tire pleinement parti des fonctions de collaboration, si on est ouvert à la discussion. Nos outils encouragent des comportements qui à terme influencent l’entreprise dans son ensemble, à devenir collaborative et communicante. On ne peut pas contrôler la culture de l’entreprise, mais on peut contrôler le choix des outils, et ces outils favorisent certains comportements qui aident à construire la culture DevOps de l’entreprise.
L’automatisation est une nouvelle façon de travailler, qui bouleverse les habitudes. Comment s’assurer de son adoption ?
George : En effet quand on implémente une solution d’automatisation dans une société où les employés effectuent les mêmes tâches depuis plusieurs années, voire des dizaines d’années, les gens peuvent se sentir menacés. Il alors difficile de s’assurer de leur coopération et de la réussite du projet. Dans ce type de situation, je pense qu’il faut mener par l’exemple, travailler avec les gens, voir ce qui leur pose problème, et ce qui peut être amélioré. Il est nécessaire de progresser par petites étapes, emporter l’adhésion grâce à des quick win, montrer que l’automatisation permet de mieux faire son travail, et de façon plus agréable. Cassons le mythe de l’automatisation qui détruit les emplois : cela fait 20 ans qu’on dit que l’automatisation va nous mettre au chômage, et ce n’est toujours pas arrivé. Quand on s’engage dans l’automatisation, il reste toujours beaucoup de travail à faire : tester le code, s’assurer que les dépendances ont également été testées, mettre en place du monitoring… on se libère pour faire un autre travail, différent. C’est l’opportunité d’essayer de nouvelles choses.
Jessica : Pour réussir une transformation vers l’automatisation, il est nécessaire d’aider les gens à progresser, mais il ne faut considérer personne comme étant “à la traîne”. Nous avons tous eu un jour besoin d’aide au changement, nous devons donc faire preuve d’empathie.
Avancer par petites étapes vers la culture DevOps c’est aussi le propre de la philosophie Kaizen abordée lors du TIAD ?
Jessica : Oui, c’est une philosophie qui a son rôle à jouer dans ce voyage vers l’automatisation que nous sommes amenés à entreprendre. Nous avons tous des freins, des résistances envers le changement, le plus souvent parce que nous sommes incertains des premières actions à mener. On a peur de prendre la mauvaise décision, de choisir le mauvais outil. S’engager dans ces changements radicaux demande du courage, de la confiance, c’est une démarche personnelle et pour nous y aider nous pouvons nous appuyer sur la philosophie Kaizen.
Comment l’accélération des rythmes technologiques a changé la façon dont on apprend dans l’IT ?
Jessica : Oui, nous devons avoir une nouvelle approche de l’apprentissage. On a longtemps favorisé un processus d’apprentissage très formel, et cette approche reste valable, mais on s’aperçoit dans l’IT qu’un diplôme en particulier n’est pas forcément indicateur de talent, ou ne garantit pas le succès d’un projet. Aujourd’hui sur le marché, de nombreux professionnels apprennent au bon moment ce qui est nécessaire pour leur travail, ce sur quoi ils veulent travailler, parce ce sujet les intéresse. L’apprentissage continu dans l’IT est l’un des plus grands succès de notre voyage dans l’automatisation : n’importe qui peut apprendre, le savoir n’est pas protégé, au contraire il est largement accessible. Cela ne signifie pas pour autant que ça sera simple, il faut vouloir s’en donner la peine, et c’est quelque chose que nous devons encourager, cette volonté d’apprendre et de remettre en question ce que l’on sait.
Est-ce que l’IT contribue à transformer l’organisation des sociétés, en libérant l’information ?
Jessica : Oui, l’impact du DevOps est transformant, il force à la transparence. Il est impossible pour une entreprise de passer à l’échelle sans s’assurer que chacun ait le savoir nécessaire pour être efficace dans son rôle.
George : Le revers de la médaille, c’est que beaucoup pensent que le DevOps signifie que tout est ouvert, tout est absolument transparent. Or, je pense que l’objet du DevOps est de faire en sorte que les bonnes personnes aient accès à la bonne information au moment où ils en ont besoin. Dans le DevOps, il faut trouver le bon équilibre entre la transparence et la conformité. Nous avons besoin de partager l’information rapidement, mais nous avons aussi besoin de savoir qui a accès à cette information, tout aussi rapidement. Je pense d’ailleurs qu’il faudrait étendre, en les adaptant, les concepts du DevOps à l’ensemble de l’entreprise.